Commentaire sur le
sous-financement dramatique de la recherche et de l'enseignement
supérieur
par Henri-Edouard Audier
et Jean-Marc Douillard
Pour certains scientifiques - qui parlent avec admiration de ses séances de travaux dirigés - Henri Audier est enseignant de chimie. Pour d’autres, c’est un chercheur spécialisé en spectrométrie de masse (il paraît même qu’il y a un phénomène expérimental qualifié « d’effet Audier » !)
Pour la plupart d’entre nous, Henri Audier est un militant totalement
investi dans le combat syndical
pour la qualité de la recherche française et son
rajeunissement. Il est membre du Syndicat National
des Chercheurs scientifiques et de Sauvons la Recherche.
De ce fait, Henri Audier a pendant un certain temps été
administrateur du CNRS. C’est sans doute
là qu’il a appris à lire une annonce gouvernementale et
qu’il a compris que les mots « budget
sincère » n’avait pas forcément le même
sens pour tout le monde.
Depuis quelques années, Henri Audier passe un temps
considérable à décrypter les budgets de la
recherche de l’ensemble du monde. Le texte qui suit est une analyse de
la place de la France dans la
recherche mondiale.
Ce texte mélange deux aspects. Il est à la fois une
approche rigoureuse menée à partir des chiffres
disponibles, analysés dans leur spécificité et
leur contexte (on verra ainsi par exemple que la France
ne compte pas le temps de travail en recherche des
enseignants-chercheurs de la même façon que
les autres pays, ce qui conduit à des résultats
faussés quant au « rapport
qualité-prix » d’une
publication - pour autant que cette notion ait un sens quelconque).
C’est aussi un pamphlet. Qui connaît Henri le sait
particulièrement remonté par les annonces
gouvernementales, depuis un certain nombre d’années. Il les
prend pour un mensonge et est
scandalisé. Comme beaucoup de chercheurs (autrement dit, membres
de la communauté
universitaire... pour ma part, je ne fais aucune différence
entre techniciens, chercheurs, enseignants,
thésards, etc.), il admet pouvoir être critiqué sur
la qualité du travail ! Nous ne sommes que des
humains... Il est par contre inadmissible qu’on croit que nous ne
savons pas compter !
J’ai retravaillé ce texte en éliminant certains passages et en changeant pas mal de tournures. Non pas qu’il y ait un manque de rigueur, bien au contraire. Mais, à mon avis, la force du document passe avant tout dans l’analyse et la comparaison des chiffres, pas dans les digressions. Le coté polémique qui reste présent me plait bien. L’analyse des chiffres qui suit montre que Henri Audier a toutes les raisons pour être agacé par les budgets de la recherche et de l’enseignement supérieur. Et par les annonces qui en sont faites du coté du gouvernement et de certains journaux, proches du gouvernement.
La principale leçon que je tire de ce texte est
l’évolution de la politique gouvernementale en
quelques années. Voilà 20 ans, ce qui faisait
polémique était l’idée que l’on pouvait donner de
l’argent des impôts pour la recherche privée. On pouvait
défendre l’idée en signalant que cet argent
allait à la pensée et aux salaires des jeunes
formés par la recherche.
Aujourd’hui, il est clair que l’argent pris à la recherche
publique ne va même plus à la recherche
privée. Il va aux administrateurs des entreprises, en fonction
du chiffre d’affaires. Tout simplement.
Il faudrait donc enlever le mot « recherche » du
groupe de mots « crédit d’impôt
recherche ». On
peut en déduire que l’argent pour la recherche publique baisse
de façon vertigineuse en France.
C’est un scandale, qui pose un très grave problème
à la jeunesse de ce pays et de ce continent. Pour
son histoire immédiate, pour son futur. Evidemment, ce texte,
l’édition de ce texte, sa mise à la
disposition des citoyens sont actes militants.